« Il faut agir, on va leur apprendre à nager ! » : comment une association lutte contre les inégalités à Marseille par l’apprentissage de la natation
Passionné par la Méditerranée et dévoué à sa ville, Brahim Timricht a fondé il y a plus de vingt ans l’association Le Grand Bleu pour initier les jeunes des quartiers populaires aux activités nautiques.
Savoir nager pour s’épanouir et saisir de nouvelles opportunités. C’est le pari de Brahim, qui souhaite donner accès à la mer aux enfants qui vivent à Marseille, mais n’ont jamais eu la chance d’en profiter.
Le regard posé sur l’horizon, Brahim affiche un large sourire : « Je ne me lasse pas de les voir partir en mer, alignés sur leurs kayaks ou paddles. C’est magnifique, vraiment magique », confie-t-il avec enthousiasme. Ce directeur plein d’énergie n’a qu’un objectif : permettre à tous les jeunes de sa ville de découvrir les joies de l’eau.
« À l’origine, on faisait surtout du kayak de mer. Mais la moitié des enfants ne pouvait pas participer, car ils ne savaient pas nager », se souvient-il. Un souvenir marquant : un bus entier d’enfants du quartier de Félix-Pyat, où seuls la moitié sont allés sur l’eau, tandis que les autres restaient sur la plage. « Ils ont traversé toute la ville pour simplement regarder la mer ? C’était une injustice. Alors, on a décidé de leur apprendre à nager ! »
Les défis de la natation à Marseille
À Marseille, un enfant sur deux ne sait pas nager en entrant en 6e, et ce chiffre grimpe à deux sur trois dans les quartiers défavorisés. La ville manque cruellement de piscines, avec seulement 15 installations, dont 5 seulement dans les quartiers nord. Depuis sa création, Le Grand Bleu a permis à 12 000 enfants d’apprendre à nager, mais la demande continue d’augmenter.
Les mamans aussi à l’eau
Pendant que les enfants apprennent à nager, les mamans tissent des liens sur la plage. Avec le soutien de l’association « Mères-Enfants PACA », ces femmes, souvent isolées, participent pour la première fois à des séances de natation. Cet été, grâce à Le Grand Bleu, elles ont enfin l’opportunité d’apprendre à nager. Pour certaines, comme Lydia et Salina, c’est un rêve devenu réalité. « C’est une libération », confie Salina, tandis que Nedjoua, en pleurs, réalise son rêve en sautant dans l’eau pour la première fois.
Formations aux métiers de la mer
Le Grand Bleu propose également des formations pour devenir surveillant de baignade, sauveteur ou maître-nageur. Brahim a vu grandir et se former de nombreux jeunes, comme Ahmed Houssine, qui travaille aujourd’hui à l’année en tant que maître-nageur à la piscine de Frais Vallon. Dans des quartiers où le chômage atteint parfois 27 %, cette initiative représente une véritable bouffée d’oxygène.
« Apprendre à nager, c’est se donner la chance de s’en sortir, dans l’eau comme dans la vie », résume Brahim. L’objectif de l’association est aussi de permettre aux enfants de se réapproprier la mer, trop souvent perçue comme réservée aux touristes.
Ce portrait plein d’espoir des quartiers marseillais en mouvement a été capturé par Myriam Elhadad dans son film « Un été à l’Estaque », diffusé pour la première fois en mai 2023.
Ce contenu a été initialement diffusé sur France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur en mai 2023. Par Florence Jaillet, Journaliste.
Crédit photo : La base nautique de Corbière • © Eclectic /FTV
